ALLOCUTION DU DR. FIDEL CASTRO RUZ, PRÉSIDENT DES CONSEILS D’ETAT ET DES MINISTRES DE LA RÉPUBLIQUE DE CUBA. SÉANCE PLAINIÈRE DE LA 105 CONFÉRENCE DE L’UNION INTERPARLAMENTAIRE. PALAIS DES CONVENTIONS, LA HAVANE. CUBA. LE 5 AVRIL 2001.

En vue de gagner du temps, nous publions la traduction du texte écrit par Son Excellence Dr. Fidel Castro, sans inclure les réflexions, remarques et commentaires intéressants qu’il y a ajoutés durant son intervention.

Madame la Présidente et autres membres de la présidence,

Honorables parlementaires,

Quand je suis intervenu en 1981 à la 68e Conférence interparlementaire, après avoir apporté des chiffres et des données qui montraient l'abîme croissant séparant le monde développé et opulent des pays qui avaient été ses colonies et ses possessions, victimes d'un pillage ininterrompu pendant des siècles, j'avais dit quelque chose qui pouvait sembler outrancier : « Si le présent est tragique, l'avenir est sombre. »

Que personne ne tente de nous berner et de nous leurrer en recourant à ces nouvelles terminologies issues de la propagande hypocrite des experts en mensonges et en tromperies au service de ceux qui ont imposé à l'humanité un ordre économique et politique toujours plus inégal et injuste, qui n'a rien absolument rien de solidaire ni de démocratique, et ne contient même pas un iota de respect pour les droits les plus minimes dont sont redevables les êtres humains.

Quand j’ai dit cette phrase, je n'exagérais pas.

La dette extérieure du tiers monde, qui se montait en 1981 à 500 milliards de dollars, s'est chiffrée en 2000 à 2,1 billions. L'Amérique latine, qui devait alors 255 188 000 000 de dollars, en devait l'an dernier 750 855 000 000.

Le service de cette même dette, qui se montait en 1981 à 44, 2 milliards de dollars, est passé l'an dernier à 347,4 milliards.

Le Produit national brut (PNB) par habitant des pays développés était en 1978 de 8 070 dollars; vingt ans après, en 1998, il se chiffrait à 25 870 dollars, tandis que celui des pays à plus bas revenu, qui était de 200 dollars en 1978, avait à peine monté à 530 en vingt ans. Bref, l'abîme s'est creusé.

Notre planète comptait en 1981 570 millions de sous-alimentés, la quasi-totalité dans le tiers monde : en l'an 2000, elle en comptait 800 millions.

Les chômeurs sont passés de 1 103 000 000 en 1981 à 1,6 milliard en 2000.

De nos jours, les 20 p. 100 les plus riches de la population mondiale représentent 86 p. 100 des dépenses de consommation privées, alors que les 20 p. 100 les plus pauvres ne signifient que 1,3 p. 100.

Dans les pays riches, la consommation d'électricité par habitant est dix fois plus élevée que dans l’ensemble des pays pauvres.

Selon des chiffres des Nations Unies, 20 p. 100 de la population mondiale vivant dans les pays les plus riches possédaient en 1960 un revenu trente fois supérieur à celui des nations les plus pauvres. En 1997, ce même revenu était déjà 74 fois plus élevé.

Selon des études réalisées par la FAO de 1987 à 1998, 2 enfants sur 5 du monde sous-développé souffrent d'un retard de la croissance, et 1 sur 3 ne pèse pas assez pour son âge.

Le tiers monde compte 1,3 milliard de pauvres, soit 1 sur 3. Dans son dernier rapport sur la pauvreté, la Banque mondiale pronostique que 1,5 milliard de personnes pourraient vivre dans la pauvreté la plus absolue au seuil du nouveau millénaire.

Vingt-cinq pour cent de la population du monde la plus riche consomment 45 p. 100 de la viande et du poisson, et 25 p. 100 de la plus pauvre, seulement 5 p. 100.

En Afrique subsaharienne, le taux de mortalité infantile pour 1 000 naissances vivantes est de 107 dans la première année, et de 173 jusqu'à la cinquième année. En Asie du Sud, il est de 76 et de 114 respectivement. En Amérique latine, selon l'Unicef, la mortalité infantile chez les moins de cinq ans est de 39.

Plus de 800 millions d'adultes sont toujours analphabètes.

Plus de 130 millions d'enfants ne vont pas à l'école.

Plus de 800 millions de personnes - et c'est là un fait réel impossible à occulter - ont une faim chronique, tout en n'ayant pas accès aux services de santé, ce qui explique pourquoi, selon les estimations, 507 millions de personnes mouront avant l'âge de quarante ans dans le tiers monde. Au sud du Sahara, ce sera presque 30 p. 100 de la population qui ne pourra fêter son quarantième anniversaire.

En 1981, c'est à peine si l'on parlait du changement climatique et le mot sida était inconnu. Or, ces deux menaces se joignent aujourd'hui aux calamités dont je viens de parler.

En 1981, la population mondiale se montait à plus de 4 milliards de personnes, dont 75 p. 100 vivaient dans le tiers monde. En 2001, nous sommes déjà plus de 6,1 milliards. Ainsi, la population mondiale a augmenté de 1,7 milliard de personnes en à peine vingt ans, soit plus que ce qu'elle avait augmenté jusqu'au début du XXe siècle depuis l'apparition de l'espèce humaine.

Résumons : la part du revenu mondial revenant aux pays qui constituent aujourd'hui le tiers monde, qui était de 56 p. 100 voilà un siècle et demi, n'est plus maintenant que de 15 p. 100. N'est-ce pas là la meilleure manière d'illustrer ce qu'ont signifié pour le tiers monde et pour l'immense majorité de l'humanité le colonialisme, le capitalisme et l'impérialisme avec leurs crises, leur chaos, leur anarchie dans le domaine économique, et leur système de valeurs égoïstes et inhumaines sur le plan moral !

Notre pays, une petite nation pauvre, a été, au terme de quatre siècles de colonialisme espagnol et de cinquante-sept ans de colonialisme nord-américain, soumis à un blocus économique brutal dès le moment même où, pour la première fois dans notre histoire, nous nous sommes doublement libérés : de la tyrannie et de l'empire.

Ce petit pays du tiers monde, en butte à un blocus, contre lequel les Etats-Unis ont employé tout leur arsenal - subversion, déstabilisation, sabotages, attaques pirates, des centaines de plans d'assassinat de dirigeants de la Révolution, sale guerre, guerre économique, guerre bactériologique, invasion militaire avec utilisation de personnels recrutés, payés, équipés, escortés par des bâtiments de guerre nord-américains et dirigés par le gouvernement nord-américain, menace d'extermination par guerre nucléaire - a su résister dans l'honneur à tous les coups de la superpuissance la plus grande de l'histoire, d'une Rome multipliée par mille compte tenu de son pouvoir politique, économique, militaire et technique.

Voilà maintenant quarante-deux ans que durent cette guerre économique impitoyable et ce blocus rigoureux. Nous avons dû supporter par-dessus le marché dix années de Période spéciale à partir du jour où, le camp socialiste s'étant effondré et l'Union soviétique désintégrée, nous nous sommes retrouvés sans marchés pour vendre nos produits et sans marchés pour acheter les fournitures dont nous avions besoin, alors même que les Etats-Unis renforçaient leur blocus grâce aux lois Torricelli et Helms-Burton. Aucun autre pays n'est passé par une telle épreuve.

Beaucoup croyaient que nous n'étions qu'un vulgaire satellite d'une grande puissance. La fin de la Révolution n'était plus, à leur avis, qu'une question de semaines, ou de mois tout au plus. Or, le satellite a prouvé qu'il brillait de sa propre lumière et qu'il éclairait extraordinairement tout seul comme un petit soleil de liberté, de souveraineté, de patriotisme, de justice sociale, d'égalité de chances réelles, de solidarité au-dedans et au-dehors de ses frontières, de principes moraux et humains inébranlables.

Le pouvoir, le prestige énorme, la force et l'unité du peuple, obtenus grâce à la Révolution, ne devaient-ils servir qu'à satisfaire des vanités, des ambitions de pouvoir ou des appétits de biens matériels ? Non : il fallait qu'ils servent à résister héroïquement aux coups de boutoir de l'empire au moment où notre patrie traversait l'un des moments les plus dangereux et les plus difficiles de son histoire !

Que personne, de grâce, ne prétende donner des leçons d'histoire ou de politique aux dirigeants cubains comme s'ils étaient encore à la maternelle ! Il se pourrait même bien, d'ailleurs, que les petits Cubains de nos crèches en sachent plus en la matière que certains politiciens notoires...

L’œuvre sociale accomplie dans de terribles circonstances est là, qui saute aux yeux : écrasante, irréfutable, incontournable. L'analphabétisme, qui touchait presque le tiers de notre population entre quinze et soixante ans, a été éliminé en un an, tandis que des milliers de salles de classe ont été ouvertes dans les endroits les plus reculés et des régions presque inaccessibles. Des services médicaux ont aussi été créés dans les villes et les campagnes, bien que les États-Unis, en délivrant des visas et en faisant miroiter une meilleure vie matérielle, nous aient réduit de moitié les six mille médecins dont nous disposions et de plus de moitié les professeurs de médecine. Des écoles ont été bâties par milliers, et des instituteurs et des professeurs du secondaire, formés; des secondaires du deuxième cycle, des IUT, des écoles normales, des écoles de danse, de musique, d'art, d'éducation physique et de sport et d'autres ont été ouvertes. Les établissements d'enseignement supérieur, trois seulement avant, se sont multipliés par dix dans tout le pays, dont vingt et une facultés de médecine – vingt-deux si l’on compte l’Ecole latino-américaine de sciences médicales - et quinze instituts universitaires pédagogiques.

En moins de trente ans, Cuba est devenue le premier pays d'Amérique latine et du tiers monde à diminuer la mortalité infantile à moins de 10 décès pour 1 000 naissances vivantes dans la première année, et à moins de 6,4 en pleine Période spéciale, et à élever l'espérance de vie à 75 ans. Elle a étendu les services médicaux gratis à tous les citoyens ; elle a élevé le niveau de scolarité moyen à neuf années; a diplômé plus de 700 000 universitaires, a développé un puissant mouvement artistique et culturel; se situe parmi les dix premiers pays au monde aux Jeux olympiques et a décroché plus de médailles olympiques par habitant qu'aucun autre pays au monde. Elle a gagné des milliers de médailles dans les compétitions régionales et internationales, et occupe le second rang après les Etats-Unis sur ce continent-ci. Ses écoliers occupent aussi les premières places à des compétitions de mathématiques et d'autres disciplines scientifiques.

Selon des enquêtes de l'Unesco, les connaissances de nos élèves de primaire sont presque deux fois supérieures, en moyenne, à celles des écoliers des autres pays latino-américains. Notre peuple occupe la première place parmi tous les pays du monde – développés ou non - par sa quantité d'instituteurs et de professeurs, de médecins et d'entraîneurs de haut niveau en éducation physique et en sport par habitant, ces trois branches étant décisives pour le bien-être et le développement social et économique de n'importe quel pays.

Ceci se résume par plus de 250 000 éducateurs, 67 500 médecins, 34 000 professeurs et techniciens d'éducation physique et de sport.

Nous partageons aujourd'hui cet immense capital humain avec d'autres pays frères du tiers monde sans nous faire payer un seul centime.(Applaudissements) Nos coopérants possèdent non seulement de profondes capacités techniques et scientifiques, mais le plus important : une solidarité humaine extraordinaire et un esprit de sacrifice insurmontable.

Des centaines de milliers de nos compatriotes ont accompli des missions internationalistes dans bien des pays du tiers monde, notamment en Afrique, en tant que personnels techniques, et en particulier comme combattants contre le colonialisme, l'apartheid raciste et fasciste.

Vous devez sans doute vous demander pourquoi j'énumère ces faits. Eh bien !, parce que je demande si c'est pour ça que :

1) On veut nous condamner tous les ans à Genève.

2) On nous harcèle, on nous impose un blocus, on nous fait une guerre économique depuis maintenant quarante-deux ans.

3) On veut détruire la Révolution cubaine.

Je tiens à ajouter quelque chose de plus : en quarante-deux ans de Révolution, les forces de l'ordre n'ont jamais lancé une seule fois des gaz lacrymogènes contre la population, et vous ne verrez jamais nos policiers armés de pied en cap, à cheval ou dans des voitures anti-émeutes charger contre la foule, comme cela est si fréquent en Europe et aux Etats-Unis. Notre pays ne sait pas ce que sont les escadrons de la mort, les personnes disparues, les assassinats politiques, les tortures, malgré qu’un empire frustré et sans scrupules qui souhaite rayer de la carte l'image et l'exemple de Cuba aurait-il beau lancer contre nous des milliers et des milliers de calomnies infâmes !

Parcourez donc notre pays, demandez donc aux gens, cherchez donc une seule preuve, démontrez donc que quelqu'un au gouvernement révolutionnaire a ordonné ou toléré un fait de cette nature, et je promets de ne plus jamais remonter sur une tribune publique !

Qu'ils sont sots, ceux qui croient que ce peuple-ci peut se gouverner par la force ou par autre chose qui ne soit le consensus autour de l’œuvre réalisée, la culture politique élevée de nos citoyens et les rapports enviables des dirigeants avec les masses! Plus de 95 p. 100 des électeurs participent d'une façon consciente et enthousiaste aux élections du pouvoir populaire.

Elles sont bien différentes, en revanche, la morale et la politique de l'impérialisme !

Quand les Cubains se battaient au Sud de l'Angola et que la bataille décisive se déroulait à Cuito Cuanavale, en 1988, contre les troupes sud-africaines, et que quarante mille soldats cubains et trente mille Angolais avançaient dans le Sud-Ouest vers la frontière namibienne, les racistes possédaient sept armes atomiques semblables à celles qui avaient été larguées sur Hiroshima et Nagasaki. L'OTAN le savait, les Etats-Unis le savaient, et aucun n'en a dit un traître mot, dans l'espoir que les racistes les lanceraient contre les forces cubano-angolaises.

Pendant les quinze longues années où nous avons monté la garde en Afrique australe face aux forces de l'apartheid ou lutté contre elles, les principaux pays capitalistes avaient d'importants investissements et faisaient du commerce avec le régime raciste pour des milliards de dollars chaque année. Ainsi, les investissements des Etats-Unis en Afrique du Sud se montaient alors à trois milliards de dollars, leur commerce annuel, à six milliards et leurs crédits bancaires, à trois milliards.

Il est de notoriété publique que les Etats-Unis ont été – qui pourrait l’oublier ? - les alliés militaires de l'Afrique du Sud, à travers de laquelle ils fournissaient à l'UNITA des armes en abondance, dont des missiles antiaériens portatifs et des millions de mines antipersonnel que cette organisation a semées partout en Angola, tout en rasant des villages entiers et en tuant des centaines de milliers de civils, dont des femmes et des enfants. Je n'exagère pas le moins du monde.

Une fois la mission internationaliste cubaine conclue dans l'honneur après la signature d'un accord qui a permis d'appliquer la résolution 435 des Nations Unies et de consacrer l'indépendance de la Namibie, nous en tenant rigoureusement à nos obligations de pays participant, nous avons retiré nos forces qui n'ont emporté rien d'autre d'Afrique que les restes des compagnons tombés au champ d'honneur, sans posséder un seul mètre carré de terre, comme je l'ai dit voilà quelques jours, ni un seul écrou d'usine. Aucun pays occidental n'y a jamais versé la moindre goutte de sang. Un seul, petit, distant de dix mille kilomètres de l'Afrique, l'a fait : Cuba ! (Applaudissements.)

A tout ce que j'ai mentionné au début au sujet de la situation économique et sociale dramatique des peuples du tiers monde, il faut ajouter les mesures arrogantes adoptées par la nouvelle administration des Etats-Unis dans l'arène internationale et qui peuvent créer de sérieuses complications à un moment où l'économie mondiale, en premier lieu l'économie nord-américaine, court de graves risques de stagnation, de récession, voire de crise, dont on commence déjà à sentir les effets partout : chutes du volume des exportations, des cours des produits de base, baisse des indicateurs boursiers, gros licenciements et annonces de licenciements partout.

Les faits les plus graves sont survenus en quelques semaines.

Premièrement : la décision de créer un bouclier nucléaire qui rompt unilatéralement les engagements contractés aux termes de l'accord des missiles anti-missiles balistiques, ce qui conduira inexorablement à une nouvelle course aux armements.

Deuxièmement : la décision d'opposer le veto à un projet de résolution qui proposait l'établissement d'une force d'observation pour protéger la population palestinienne,(Applaudissements) un projet qui a été soutenu par la Chine, la Russie et sept autres membres du Conseil de sécurité, quatre pays, dont deux membres permanents, s'étant abstenus.

Depuis mai 1990, les Etats-Unis ont exercé leur droit de veto à cinq reprises, dont quatre fois en relation avec le conflit israélo-palestinien. Le dernier en date, le 21 mai 1997, au profit d'Israël et au détriment des Palestiniens, au sujet d'une résolution demandant à Israël de cesser de construire un établissement à Jérusalem-Est.

Depuis 1972, les Etats-Unis ont exercé leur droit de veto à vingt-trois reprises au sujet d'initiatives visant à régler le problème palestinien.

Ce dernier veto des Etats-Unis aggrave la situation déjà compliquée du Moyen-Orient, alors qu'un gouvernement d'extrême-droite vient d'accéder au pouvoir en Israël.

Troisièmement : la décision tout aussi unilatérale de résilier les obligations contractées à la Troisième Conférence des Parties à la Convention des Nations Unies sur le changement climatique, tenue à Kyoto fin 1997, en vertu de laquelle trente-quatre pays industrialisés avaient décidé – ce dont l’humanité a un besoin désespéré - de réduire de 5,2 p. 100 d'ici 2012 les émanations de gaz à effet de serre, les USA s'étant engagés, eux, à les réduire de 7 p. 100. C'est un coup dur pour l'opinion publique mondiale, en particulier dans les pays européens qui ont contribué le plus à la signature de cette Convention.

Quatrièmement : des déclarations grossières et humiliantes à l'adresse de la Russie et de la Chine, dans un langage typique de la guerre froide, ce qui traduit très bien la mentalité qu'on constate clairement chez bien des membres de l'équipe qui entoure et conseille le président actuel des Etats-Unis.

Cinquièmement : mépris patent, tangible, de l'Amérique latine, dans la mesure où la nouvelle administration a proposé comme sous-secrétaire d'Etat adjoint aux affaires latino-américaines un personnage sordide, à mentalité fasciste, connu pour avoir participé aux côtés d'Oliver North, quand il était conseiller spécial pour la diplomatie publique du secrétaire d'Etat de l'administration Reagan, à l'opération, devenue ensuite un scandale, destinée à vendre des armes pour obtenir des fonds qui permettaient de mener la sale guerre contre le gouvernement sandiniste au Nicaragua, en violation d’accords du Congrès l’interdisant formellement. Ce personnage a signé des documents et déclarations au nom de chefs contre-révolutionnaires nicaraguayens, dont certains ne savaient même pas lire ni écrire, violé des lois et fait preuve d'une absence totale de morale. Bien des organes de presse nord-américains ont critiqué durement cette proposition et de nombreux gouvernements latino-américains tiquent.

Ainsi donc, ces gestes dessinent clairement les traits et la personnalité du nouvel occupant du trône présidentiel aux Etats-Unis.

Rien de ceci n'étonne Cuba. Nous connaissons les liens et les engagements étroits de monsieur Bush avec la Fondation nationale cubano-américaine, une mafia terroriste – je répète : une mafia terroriste - qui a financé la pose de bombe dans des hôtels de La Havane, dont plusieurs ont éclaté, en vue de liquider notre industrie touristique. Cette Fondation a aussi organisé un attentat contre celui qui vous parle au Sommet ibéro-américain tenu sur l'île Margarita, dont les exécutants ont été capturés par hasard par un garde-côte nord-américain- qui pensait peut-être qu’il s’agissait de trafiquants de drogues - alors qu'ils naviguaient face à Porto Rico cap sur leur objectif. Les détenus en personne ont révélé leurs visées et les auteurs du plan. Malgré des preuves irréfutables, ils ont été acquittés.

Le dernier grand méfait de la Fondation a été une nouvelle tentative d'assassinat de ma modeste personne, organisée pendant un autre Sommet ibéro-américain tenu au Panama en novembre dernier, en vue de quoi elle a recouru au terroriste le plus connu de ce continent, l'auteur du sabotage en plein vol d'un avion cubain, le 6 octobre 1976. au cours duquel sont morts soixante-treize personnes, dont l’équipe junior complète d’escrime de Cuba qui rentrait du Venezuela où elle avait raflé toutes les médailles d’or. Cette fois-ci, cet individu a introduit, depuis El Salvador, de puissants explosifs qui devaient éclater à l'Université de Panama quand je serais réuni avec mille étudiants. La dénonciation opportune de ce plan a entraîné l'arrestation de ce terroriste et de trois autres d'origine cubaine, membres de la mafia de Miami, dont l'histoire au service des organes spéciaux des Etats-Unis est particulièrement sanglante. Les autorités et le gouvernement des Etats-Unis savent pertinemment que tout ce que je dis est vrai.

Le 3 janvier dernier, le représentant Bob Barr a soumis à la commission des Relations extérieures de la Chambre des représentants un projet de loi visant à annuler un décret-loi de l'administration Ford, en date du 18 février 1976, relatif aux activités de renseignements hors des Etats-Unis et dont la sectionV, alinéa g, précise qu'aucun fonctionnaire du gouvernement ne pourra participer à des assassinats politiques ou conspirer dans ce but.

Mais qui est ce Bob Barr ? Un représentant républicain de Georgie. Après avoir travaillé pour la CIA, il a été nommé par Reagan, en 1986, procureur du district Nord de Georgie. Il est membre perpétuel de l'Association nationale du fusil et membre de son Conseil d'administration. Il a été distingué comme leader du Congrès pour l'année par le Conseil du tir sportif; législateur de l'année pour le droit à l'armement par la Commission des citoyens en faveur du droit de détenir et de porter des armes (ces armes qui servent aux enfants à s'entretuer dans les écoles, en plus de l'incitation à la violence que les médias ne cessent de leur inculquer) et déclaré Législateur nouveau de l'année par la commission d'action politique conservatrice.

La mafia terroriste de Miami et l'extrême-droite des Etats-Unis travaillent fébrilement, peaufinent des plans, des projets de loi et des mesures agressives contre Cuba. En particulier, des projets concernant des relations directes avec ce qu'ils appellent l'opposition et l'allocation de millions de dollars pour troubler et déstabiliser notre pays. Mais que personne ne se leurre : Cuba prendra les mesures de riposte pertinentes.

Le gouvernement des Etats-Unis, dont les mains sont si sales, ne cesse de faire tout son possible pour provoquer des problèmes à cette Conférence-ci, pour la ternir et même l'utiliser pour ses plans perfides.

Ainsi, les ambassades nord-américaines ont adressé des lettres à un certain nombre de parlementaires qui devaient y participer, et des amis les ont fait parvenir à nos autorités. L'une d'elles dit textuellement :

Votre visite à Cuba en vue d'assister à la Conférence de l'Union interparlementaire (UIP) vous donnera une occasion en or de démontrer votre solidarité avec la démocratie et les activistes des droits de l'homme à Cuba.

Comme vous le savez, votre collègue tchèque, M. Ivan Pilip, a été arrêté et emprisonné pendant trois semaines par la police secrète cubaine en février pour le « crime » d'avoir rencontré des activistes de la démocratie.

Il a fallu l'intervention de M. Syg Johnsson, de l'UIP, et de M. Letelier, président de la Commission des droits de l'homme de l'UIP, pour que les Cubains se décident à libérer Pilip et son collègue Jan Bubenik.

L'UIP est donc directement en rapport avec la situation des droits de l'homme dans l'île et a une chance d'adresser un message clair et de principe, en son nom et au nom de votre parlement, en faveur des droits de l'homme et de Cuba en rencontrant des activistes.

Durant le Sommet ibéro-américain tenu à La Havane en 1999, un certain nombre de dirigeants latino-américains ont aussi rencontré des activistes cubains, que ce message clair a impulsés.

Nous savons que des activistes de grande qualité et jouissant du respect international désirent rencontrer des parlementaires étrangers pour leur communiquer leurs points de vue au sujet des perspectives d'ouverture démocratique et économique.

Une autre lettre de ce genre indique, entre autres choses :

Alors que beaucoup de gens espéraient que la situation des droits de l'homme à Cuba s'améliorerait après la visite du pape en janvier 1998, elle a de fait empiré.

Cette dégradation s'est accrue ces six derniers mois, des centaines d'activistes ayant été arrêtés rien que depuis décembre.

[...]

Des centaines sont encore emprisonnés, la plupart pour des vétilles telles que la transmission d'exemplaires de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Cuba a annulé récemment la visite de M. Volmer, vice-ministre allemand des Affaires étrangères, parce qu'il a osé suggérer qu'il aborderait la question des droits de l'homme durant sa visite.

Cuba a attaqué durement l'Argentine en février après qu'un journal de ce pays a affirmé que le gouvernement voterait une résolution de la Commission des droits de l'homme de Genève sur Cuba.

Au début de l'année, un parlementaire tchèque, Ivan Pilip, et un ancien parlementaire, Jan Bubenik, ont été arrêtés pendant plus de trois semaines tout simplement parce qu'ils avaient rencontré des activistes et des journalistes indépendants cubains.

Aucun législateur nord-américain n'a participé à une réunion de l'UIP ces dix dernières années.

Le Congrès des USA a décidé en 1998 de se retirer de l'UIP si leur cotisation n'était pas réduite.

La cotisation n'ayant pas été réduite, le secrétaire de l'UIP a été informé officiellement en octobre 2000 de l'intention des USA de se retirer de l'Union, ce qui s'est fait aussitôt.

Quand on lit ces documents, on sait très vite et sans erreur qui conspire, qui organise, qui ment, qui intrigue, qui paie et qui commande.

On n'a pas de mal à comprendre non plus jusqu'à quel point l'arrogance, la frustration et les fiascos incessants peuvent inciter le gouvernement des Etats-Unis au mépris des institutions, à la provocation et à l'ingérence dans les organisations internationales et dans les affaires intérieures de n'importe quel pays.

Voilà quarante ans qu'il recrute des mercenaires. Notre peuple est aujourd'hui plus uni que jamais, et la Révolution est plus forte que jamais. Les conspirations, les plans, les complots et les crimes commis contre notre patrie échoueront. Nous démasquerons ses manœuvres, nous dénoncerons sa perfidie et ses mensonges. Nous n'hésiterons pas non plus à accuser et à démasquer ses complices. Aucun ne sera épargné par la critique la plus juste et la plus dévastatrice, aussi haut placé qu'il soit. Aucun intérêt économique ni aucune menace de représailles ne ternira la dignité et le courage de notre peuple. Voilà pourquoi nous estimons répugnante et cynique – nous le disons tout net - la conduite de ceux qui condamnent le blocus en guise de feuille de vigne hypocrite, naïve et ridicule afin de pouvoir condamner ensuite Cuba pour de prétendues violations des droits de l'homme, ce qui est une infamie

Rien ne pourra jamais justifier la lâcheté et le mensonge. Cuba méprise ceux qui agissent ainsi et n’a que faire des votes contre le blocus de ceux qui soutiennent cyniquement les arguments par lesquels l'empire vise à justifier ses crimes.

Rien n'a pu ni ne pourra jamais vaincre la dignité, la morale et l'héroïsme d'un peuple qui a d'ores et déjà écrit une page indélébile dans l'histoire de notre époque (Applaudissements).

Je me félicite de la compagnie de tant et de si dignes parlementaires qui nous ont honorés de leur présence et nous ont encouragés de leur solidarité.

Je vous prie de me pardonner de vous avoir pris votre temps.

Un merci éternel.

Je souhaite à cette excellente Conférence tout le succès qu'elle mérite.

Jusqu'à la victoire à jamais !

Je vous remercie (Ovation).