Réflexions du compañero Fidel

 

Les pieds sur terre

 

Alors que, le 2 avril, le Sommet du G-20 s’ouvrait et se clôturait, Karen DeYoung, journaliste connue d’un organe de presse influent, The Washington Post, écrivait :

« Le sénateur Richard G. Lugar a appelé le président Obama à nommer un envoyé spécial qui engagerait des conversations directes avec le gouvernement communiste de l’île… »

« Les presque cinquante ans d’embargo économique appliqué à Cuba, a affirmé Lugar (républicain de l’Indiana) dans une lettre adressée le 30 mars à Obama, mettent les États-Unis en désaccord avec les vues du reste de l’Amérique latine, de l’Union européenne et des Nations Unies, et "minent notre sécurité au sens le plus large et nos intérêts politiques sur le continent". »

«Le Sommet des Amériques qui se tiendra à Trinité-et-Tobago du 17 au 19 avril "vous offrirait une occasion unique, en modifiant notre position en matière de politique cubaine, de bâtir un climat plus accueillant pour faire progresser les intérêts étasuniens dans la région", écrit Lugar. »

« Lugar, le républicain le mieux placé à la Commission sénatoriale des Relations étrangères, a pris la tête d’un vaste mouvement qui prône une nouvelle politique et qui comprend la Chambre de commerce et d’autres groupes d’affaires, un certain nombre de gouvernements d’États et des groupes des droits de l’homme. Une majorité bipartite du Congrès a voté à maintes reprises l’allégement des restrictions aux voyages et à d’autres contacts avec Cuba, bien que ces mesures aient toujours  échoué sur la menace du veto présidentiel sous l’administration Bush. » 

« Lugar a parrainé une loi bipartite soumise au Sénat cette semaine qui lèverait toutes les restrictions aux voyages à Cuba, exception faite des cas de guerre ou de menaces directes à la santé ou à la sécurité… »

« […] Selon Lugar, la désignation d’un envoyé et l’ouverture de conversations directe sur des points tels que l’émigration et l’interdiction de la drogue "favoriseraient des intérêts de sécurité vitaux des USA… et pourraient en ultime instance créer des conditions à une discussion sérieuse sur les points les plus controversés". »

L’article de DeYoung prouve de toute évidence que le sénateur de l’Indiana a les pieds sur terre. Il ne part pas de positions philanthropiques. Il travaille, comme elle le dit, en accord avec « la Chambre de commerce et d’autres groupes d’affaires, un certain nombre de gouvernements d’États et des groupes des droits de l’homme ».

Je suis sûr que Richard G. Lugar ne craint pas qu’on le taxe de mou ou de socialisant, ce qui est une idiotie.

Si le président Barack Obama parcourt le monde en affirmant, comme il l’a fait dans son propre pays, qu’il faut investir les sommes nécessaires pour sortir de la crise financière, garantir les logements où vivent une quantité incalculable de familles, assurer des emplois aux travailleurs étasuniens qui sont en train de les perdre par millions, procurer des services de santé et une éducation de qualité à tous les citoyens, comme peut-il concilier tout ceci avec des mesures de blocus visant à imposer sa volonté à un pays comme Cuba ?

Les drogues constituent de nos jours l’un des plus graves problèmes de ce continent et de l’Europe. Dans la lutte contre le narcotrafic et les activités criminelles organisées, des phénomènes stimulés par l’énorme marché des États-Unis, les pays latino-américains perdent presque dix mille hommes par an, soit plus du double de ceux que les USA ont perdu dans la guerre en Iraq. Leur nombre augmente, et il s’en faut de beaucoup que le problème soit réglé.

Ce phénomène n’existe pas à Cuba, proche voisin des États-Unis. Sur cette question épineuse et dans la lutte contre l’émigration illégale, les garde-côtes étasuniens et cubains coopèrent depuis de nombreuses années. Par ailleurs, aucun Étasunien n’est mort des suites d’actions terroristes en provenance de notre pays, tout simplement parce que nous ne les tolérerions pas.

La Révolution cubaine, que le blocus et la sale guerre n’ont pu détruire, se fonde sur des principes éthiques et politiques, ce qui explique pourquoi elle a été capable de résister.

Je ne prétends faire le tour de la question, tant s’en faut.  J’omets de ces Réflexions les dommages causés à notre pays par l’attitude arrogante des États-Unis vis-à-vis de Cuba.

Ceux qui sont capables d’analyser sérieusement les événements, tel le sénateur de l’Indiana, avancent un argument irréfutable : les mesures utilisées par les États-Unis contre Cuba pendant presque un demi-siècle se sont soldées par un fiasco total.

Inutile de souligner ce que Cuba a toujours dit : nous n’avons pas peur de dialoguer avec les États-Unis.  Nous n’avons pas besoin non plus de la confrontation pour exister, contrairement à ce que pensent certains sots ; nous existons justement parce que nous croyons à nos idées et que nous n’avons jamais craint de dialoguer avec l’adversaire. C’est là la seule manière de favoriser l’amitié et la paix entre les peuples.

 

 

Fidel Castro Ruz

Le 5 avril 2009

13 h 04